Manque d’énergie, perte d’efficacité, cynisme lié au travail, fatigue intense … Voilà ce qui caractérise l’épuisement professionnel qu’on appelle aussi burn-out. Alors il faut savoir que l’OMS qui est l’organisme mondial de la santé ; ne considère pas le burn-out comme une maladie. Par contre, ce que nous dit l’OMS c’est que le burn-out est le résultat d'un stress chronique lié au travail. Ce qu’il faut donc avoir en tête pour bien comprendre ce qu’est le burn-out , c’est qu’il s’agit d’une exposition prolongée face à une situation déplaisante, nuisible, désagréable dans l’environnement de travail. Donc on a là , une rencontre entre un individu et une situation de travail dégradée.
Pour bien vous expliquer, ce phénomène, je vais vous raconter l’histoire de mon client Jacques. Jacques a 29 ans, il est manager dans une entreprise agroalimentaire. Il avait choisi ce métier. C’était vraiment son but, car pour lui manager ça voulait dire accompagner non seulement l’entreprise à atteindre ses objectifs, mais aussi les personnes de son équipe à atteindre leurs objectifs de carrières. Sauf qu’aujourd’hui, il est complètement vidé. Il a l’impression d’être dépassé, de ne plus rien contrôler, d’être complètement broyé. Il se sentait écrasé entre la pression constante de ses supérieurs et le fait de devoir faire en sorte que son équipe reste engagée. Au final, lui qui voulait accompagner son équipe dans leur développement professionnel se retrouve à en avoir marre de leurs questions, il n’a d’ailleurs plus le temps d’y répondre. Ce qu’évoque Jacques dans son discours sont les dimensions qui caractérisent le burn-out.
La première dimension est l’épuisement émotionnel, Jacques l’exprime en nous disant qu’il est complètement vidé. La deuxième dimension est la dépersonnalisation, le cynisme et on le reconnaît dans le discours de Jacques, car il y a une totale déshumanisation à l’autre, il ne voit même plus l’intérêt de répondre aux questions de son équipe. Et enfin, la troisième dimension : la diminution de l’accomplissement personnel au travail. Jacques se sent complètement dépassé, malgré tout ses efforts, il a le sentiment d’être dans une impasse.
Le stress de la profession est devenu trop lourd à porter, et Jacques a développé le syndrome du burnout. Ce qui a fait qu’il en est arrivé à là, c’est qu’on lui a demandé un engagement professionnel trop intense. Jacques comme d’autres personnes qui ont vécu un burn-out, à fait face à diverses causes qui ont contribué à cet épuisement professionnel. Cela peut être dû à une surcharge de travail, ça peut aussi passer par des objectifs qui sont irréalistes, flous ou contradictoires, ou encore le fait d’avoir une faible autonomie décisionnelle dans son travail. Il existe d’autres facteurs et si vous êtes curieux, et que vous souhaitez en savoir plus, je vous ai partagé un lien en description qui vous détaille tous ces facteurs.
En tout cas, sachez qu’il y a un point commun entre tous ces facteurs, c’est qu’ils sont tous liés au stress. Et là, j’en vois déjà qui sont peut-être en train de se dire : "bah, si c’est le stress, il n’a qu’à le gérer tout seul, c’est un adulte, il est grand , qu’est-ce que tu veux y faire de son stress ? Pourquoi en tant qu’employeur je dois m’en préoccuper ?".
Pour ceux qui se font ce type de réflexions, j’aurais pu répondre : c’est la loi. Et en tant qu’employeur vous vous devez de protéger la santé physique et mentale de vos salariés. Mais on ne va pas aller sur le terrain du légal, car je trouverai cela dommage que vous fassiez de la prévention en entreprise juste parce que la loi le demande. Je pense qu’il serait plus intéressant et efficace, que cela passe par le fait de comprendre pourquoi c’est important pour vous. Quel message vous transmettez à vos clients, et à vos salariés en vous préoccupant de leur santé mentale et physique, quelles valeurs est-ce que vous montrez ? Qu’est-ce que dit votre culture d’entreprise ?
Il faut savoir que la littérature scientifique montre clairement que le stress et les problèmes psychosociaux liés au travail provoquent une augmentation des taux d’absentéisme, de rotation du personnel, une baisse de la productivité et de la performance. Et au-delà de tout ce que je viens de vous évoquer, les contraintes de l’environnement de travail risquent de laisser des traces sur la santé des salariés comme de l’anxiété, de l’agressivité, une perte de motivation, etc. Et qu’importe le métier , le secteur d’activité , le burn-out va concerner toutes les professions qui demandent un engagement personnel intense.
Et ce fort engagement personnel, ce stress, va survenir à chaque fois que les contraintes imposées par notre environnement nous semblent supérieures à ce que nous avons comme ressources.
Il est vrai que la plupart des gens stressent de temps en temps à cause de leur travail. Je vous avouerai que moi-même, à chaque fois que je publie un épisode de podcast, je stresse, je me demande ce que vous allez en penser, si j’ai bien mis les éléments qu’il fallait, etc. Mais ce stress est passager, on le dit alors aigu. Le problème va se poser si ce stress perdure dans le temps. Il devient alors chronique, et il peut être considéré comme un épuisement professionnel. Pour éviter cet épuisement, vous avez deux solutions :
Faire la prévention du burn-out, c’est non seulement empêcher une aggravation de la santé des personnes qui sont déjà menacées d’épuisement, mais c’est aussi prévenir l’apparition d’autres cas.
Au final, il est vrai que le burn-out s’explique par des caractéristiques liées au travail, mais aussi à l’individu. Car ce qu’on remarque le plus souvent et ce que nous montrent les études scientifiques, c’est que les traits de personnalités jouent un rôle dans la survenue de l’épuisement professionnel. Les personnes qui sont plus à même à un épuisement professionnel sont des personnes persévérantes, consciencieuses, qui se sentent utiles et accomplies par leur travail. Alors attention tout de même, car oui il existe des caractéristiques liées à l’individu, mais ça n’enlève pas moins le rôle de l’entreprise dans l’émergence du burn-out.
Comment est-ce qu’on réintègre un salarié qui a dû s’absenter pendant une longue période, suite à un épuisement professionnel ? Quels leviers permettent aux salariés de reprendre le travail rapidement et de manière durable après un burn-out? Quels sont les besoins de ces salariés pendant la réintégration? Qui doit être impliqué pour soutenir cette réintégration ?
Je vais tenter de répondre à toutes ces questions, mais comme je vous le dis souvent dans la plupart de mes podcasts, je ne connais pas votre situation ! Alors, adapter les conseils que je vais vous donner à ce que vous vivez ! N’appliquez pas à la lettre les recommandations que je vais vous donner, soyez malin, analysez la situation, regardez le contexte et prenez les conseils qui sont les plus adaptés à vos besoins, et n’hésitez pas à me contacter si vous avez besoin de conseils personnalisés.
Et en parlant de conseil, le tout premier que je vais vous donner est d’identifier les causes qui ont mené au burn-out. Car si le salarié revient et que vous ne vous êtes pas attaqué à la racine du problème, à comprendre pourquoi cela est arrivé et qu’est-ce qui pourrait être changé, le salarié sera exposé au même contexte. Il est donc important que les problèmes qui ont mené au burn-out soient réglés ou soient en voie de l'être lorsque le salarié reprendra le travail.
Autre point important qui est aussi à considérer : le fait de prendre des nouvelles du salarié. Un salarié qui a été absent pendant longtemps va éprouver une certaine crainte sur le fait de revenir au travail. Il peut non seulement se demander ce qui a pu changer en son absence , il peut donc craindre de ne plus être capable d’effectuer ses tâches. Alors quand je vous dis, prenez des nouvelles du salarié, je ne vous dis pas: appelez-le tous les jours ou jouez le rôle de psy. Que vous soyez RH, manager ou gérant d’une entreprise, ce n’est pas votre rôle ! Votre travail, par contre, sera de prendre des nouvelles et parfois juste demander ‘’comment ça va?’’. Cette petite phrase, toute simple, est généralement perçue comme une marque de considération et peut même contribuer à diminuer le niveau d’anxiété de la personne en absence.
Maintenir ce contact pendant toute la période d’invalidité, va aussi permettre de préserver un lien de confiance et de cette façon vous créez déjà des conditions favorables au retour au travail.
Nous arrivons maintenant à notre troisième conseil : planifier le retour progressif. Alors de mon vécu, ce qui est le plus souvent préconisé par le médecin du travail , c’est un retour progressif au travail. Ce qui veut dire que la personne ne va pas reprendre un poste à temps plein, mais revenir au travail deux jours par semaine par exemple. Et ça, ça se prépare.
Ça se prépare au niveau de l’organisation de l’entreprise , il faudra donc se demander est-ce qu’il faut aménager son poste, ses horaires ? Est-ce qu’il faut l’affecter à un poste ou à une équipe différente ? Comment est-ce qu’on va définir ses objectifs ? Il faudra aussi penser à clarifier ses tâches, son rôle , ses responsabilités.
Une des bonnes pratiques que je peux vous donner pour assurer un retour progressif au travail réussi : c’est d’échanger avec le salarié pour construire avec lui son retour.
Je vous propose maintenant qu’on passe à l’avant-dernier conseil : préparer l’équipe au retour du salarié. Car autant le salarié peut être stressé pour son retour au travail, mais l’équipe peut elle aussi être anxieuse, ne pas savoir comment réagir face à un ou une collègue qu’ils n’ont pas revu depuis plusieurs mois. Et là vous vous dites peut-être : "euh Camille t’es sur ? Car la confidentialité et tout ça, qu’est-ce que t’en fais ?".
Alors si vous avez pensé à cette question, sachez que c’est une excellente question. C’est vrai, que se dire, je ne vais rien dire à l’équipe , ça peut partir d’une bonne intention sauf que...ne pas le faire risque de créer des tensions. Certains pourraient se demander et -ça serait tout à fait légitime- : pourquoi il n’a pas les mêmes horaires que nous ? ou encore pourquoi est-ce qu’il a des tâches différentes ?
Alors, pour éviter cela, encore une fois, COMMUNIQUER, avec votre équipe ! Annoncez-leur que leur collègue va revenir, à quelle date, ce qu’il va faire, à quel rythme sans pour autant rentrer dans les détails de la santé du travailleur au risque de briser la confidentialité.
Alors oui, il faut être formé à cela et il y a même des entreprises qui vous accompagnent dans cette démarche de sensibilisation, c’est aussi ce que je fais avec mes clients et je vous assure que le faire, ça aide. Ça aide non seulement la personne qui va revenir au travail, mais ça aide aussi à délier les langues. Car très souvent, les gens en général pensent qu’une personne en épuisement professionnel est faible, qu’elle est fragile. Ajouté à cela que certains voudront peut-être surprotéger le salarié qui est de retour au travail. Et ce n’est pas non plus une bonne attitude pour que la personne puisse se sentir bien. Alors informez les autres salariés et n’oubliez pas que le soutien social est vraiment très précieux que ça soit pour le manager , pour l’équipe et pour la personne qui réintègre l’entreprise.
Ce qui m’amène à mon dernier point : le jour du retour. Cette étape doit absolument être préparée ! Ça me rappelle d'ailleurs une petite anecdote. Il y a un salarié qui suite à un épuisement professionnel s’est absenté, huit mois et à son retour, son badge ne fonctionnait plus, il avait était désactivé et impossible pour lui de rentrer dans l’entreprise. Alors je vous laisse imaginer ce qu’a pu ressentir ce salarié. Pour éviter cela, organiser à l’avance son retour et surtout en tant que manager direct, soyez présent ! Le fait d’être présent, le jour de son retour sera vu comme une marque d’attention, une façon de dire tu fais toujours partie de l’équipe ! Alors bien sûr pour préparer son arrivée, tout ne repose pas sur les épaules du manager, ne vous mettez pas cette pression. Les RH peuvent aussi vous accompagner dans cette démarche. N’hésitez pas non plus à faire un point à la fin de la journée avec le salarié, mais aussi à continuer de faire un suivi régulier. Cela vous permettra d’aider le salarié à reprendre ses fonctions, mais aussi de ne pas revenir à de mauvaises habitudes qui ont mené au burn-out.
Et encore une fois, le retour au travail d’un employé qui a subi un épuisement professionnel ne s’improvise pas ! Je sais que tous les points que je vous ai évoqués peuvent vous paraître lourds. Mais le faire peut être entièrement bénéfique pour l’entreprise. Si le retour au travail du salarié s’est bien passé, s’il a été organisé, adapté, le salarié va développer un plus grand sentiment d’appartenance à l’entreprise. Et en plus de cela, en vous posant les questions de comment cet épuisement professionnel a pu arriver, vous ne vous intéressez pas qu'a l’individu, mais au groupe, car les collègues peuvent eux aussi être à risque d’épuisement professionnel.
Est-ce que le salarié va revenir ? Est-ce que je dois rechercher une personne pour le remplacer ? De quelle façon peut-on réorganiser l’équipe ? Quel message faire passer aux salariés ? Toutes ces questions se posent très souvent lorsqu’un salarié s’absente pour cause d’épuisement professionnel. Le burn-out peut avoir de lourdes conséquences pour l’entreprise sans parler de l’effet boule de neige que cela peut avoir sur les autres salariés si la cause du problème n’est pas réglée.
De manière générale, je vous conseillerai de mettre en place une démarche collective sur les risques psychosociaux. J’avais d’ailleurs déjà fait un sujet sur les risques psychosociaux, c’était mon tout premier épisode de podcast donc si vous souhaitez en savoir un peu plus sur les risques psychosociaux, je ne peux que vous invitez à aller l’écouter ou le ré-écouter. Ça sera d’ailleurs un bon complément par rapport à notre sujet du jour.
Sachez, en tout cas, qu’une démarche de prévention et d’évaluation des risques psychosociaux vous permettra d’avoir des pistes d’actions pour prévenir le burn-out et l’éviter. Je peux d’ailleurs vous donner quelques exemples d’actions que vous pouvez mettre en place. Ça peut passer à travers, la communication avec les employés sur les facteurs de stress. En les informant ou en les formant sur les signes avant-coureurs d'épuisement professionnel. Ça peut aussi passer par le soutien social en renforçant le travail d’équipe par exemple ou en formant les gestionnaires sur la reconnaissance au travail.
Ce ne sont là que des suggestions, des exemples qui peuvent être mis en place lors de la prévention de l’épuisement professionnel. Mais ces exemples ne sont peut-être pas adaptés à votre situation alors si vous voulez agir sur du long terme, viser une démarche de prévention des risques. Si vous souhaitez limiter le risque de burn-out, il faut que vous exploriez les facteurs de risques dans les situations de travail, de voir ce qu’il est possible d’améliorer durablement dans l’organisation de travail.
Au niveau individuel, il y a un ensemble de signaux qui peuvent vous mettre la puce à l’oreille. Ces signaux peuvent être d’ordre émotionnel : donc vous pouvez par exemple avoir une personne qui d’un coup montre une grande irritabilité, une force de cynisme. Vous avez aussi des manifestations physiques , la personne peut se plaindre de manquer d’énergies ou d’avoir des troubles du sommeil. Il y a aussi des manifestations comportementales et dans ce cas vous allez retrouver une personne qui va d’un coup se replier sur elle-même , être indifférente vis-à-vis des autres, etc. C’est sur que ce n’est pas facile de détecter tous ces signaux, surtout que certains peuvent être liés à d’autres syndromes. C’est pourquoi, ce que je vous encourage surtout à faire, c’est de discuter avec le salarié qui change d’attitude. Ça peut paraitre tout bête comme conseil, mais un changement d’habitude est déjà un signal qui peut interpeller.
Les autres signaux qui peuvent aussi vous alerter sont les signaux collectifs qui peuvent traduire l'existence de risques psychosociaux. Vous pouvez repérer ces signaux grâce aux différents indicateurs de l’entreprise. Par exemple, vous pouvez regarder la fréquence et la gravité des accidents du travail, le nombre de conflits ou de violences entre salariés qui peut augmenter, mais aussi la détérioration de la qualité des produits qui peuvent être aussi une alerte sur l'existence de risques psychosociaux.
J’espère en tout cas que ces conseils vont vous permettre de repérer les premiers signaux d’épuisement professionnel et vont vous donner l’envie de faire de la santé au travail une priorité pour vous et pour ceux qui vous entourent. Je sais que j’ai abordé beaucoup de points négatifs, mais le travail a aussi et heureusement d’ailleurs son côté positif, car il constitue notre identité professionnelle, notre équilibre de vie. D’ailleurs, il y a une étude qui a été faite qui montrent que les personnes qui occupent un emploi tendent à être en meilleure santé mentale que celles qui ne travaillent pas. C’est juste que parfois, les conditions et les contextes de travail ne sont pas toujours favorables au maintien d’une bonne santé mentale. En tout cas, de mon côté je suis fermement convaincu qu’aborder le syndrome du burn-out, c’est aborder l’organisation d’une entreprise et en faire remonter les problèmes… et cela bénéficie à tous ses acteurs.